Belle Époque Society est une nouvelle proposition œnotouristique de la maison Perrier- Jouët. En pleine harmonie conceptuelle et esthétique avec la célèbre marque aux fleurs blanches, elle est une des plus originales et des plus raffinées que puisse offrir la Champagne.
Disponible à partir de l’été 2021 (ouvert depuis le 19 juin), ce programme complet d’expériences autour des cuvées Perrier-Jouët, de l’art et de la gastronomie a été pensé autour de trois espaces : le Cellier Belle Époque, la Maison Belle Époque et la Boutique Perrier-Jouët.
Fondée en 1811 à Épernay, Perrier-Jouët est une des maisons de champagne les plus renommées. Animée d’un fort esprit familial, elle est connue pour la délicatesse florale et complexe de ses vins, révélant l’essence même du chardonnay et reposant sur un savoir-faire solide et minutieux. Perrier-Jouët est également connu pour sa passion pour l’art et la nature, exprimée à travers son affinité avec le style Art nouveau.
Ceux qui n’ont pas encore eu la chance de goûter les champagnes de la maison Perrier-Jouët connaissent au moins cette marque par la fameuse bouteille de la cuvée millésimée Belle Époque, revêtue en 1902 par Émile Gallé d’un décor émaillé d’anémones blanches.
Belle Époque Society semble partir de cet illustre flacon pour se déployer autour de lui en un parcours d’une remarquable unité stylistique, associant l’Art nouveau, la gastronomie et la nature, le tout exalté par les fines bulles du champagne.
Le Cellier Belle Époque
Cet ancien chai a été entièrement redéfini en bar à champagnes avec le concours de plusieurs designers, dont l’Italien Andrea Mancuso. Un jardin paysager a été aménagé dans la cour sous forme d’espaces de verdure. Même référence à la nature à l’intérieur du cellier : de part et d’autre d’une installation végétalisée suspendue s’élèvent deux « arbres à verres » : Hypernature, composition de la Britannique Bethan Laura Wood en plaques transparentes dont la polychromie évoque celle des vitraux d’Émile Gallé. De l’observation des vignes à la dégustation des vins, l’artiste a été inspirée par une foule d’analogies : « J’ai voulu introduire un élément de fantaisie dans le rituel de dégustation. J’ai également cherché à révéler un équilibre entre l’impact visuel provoqué par l’arbre et l’impression de délicatesse que procure ce champagne. » Le second arbre, fait de fils métalliques recourbés, est l’œuvre du Néerlandais Tord Boontje. Tous deux peuvent être garnis de verres à champagne prêts à être cueillis par les visiteurs.
Ceux-ci, verre en main, peuvent s’installer à l’intérieur ou dans une des alcôves végétales de la cour-jardin et accompagner leur champagne — ou un cocktail au champagne —d’une petite restauration en continu.
Chacune de ces tapas a été prévue par Sébastien Morellon, chef exécutif de Perrier-Jouët, pour s’harmoniser avec une des cuvées de la maison : un excellent saumon fumé ou des éclats de vieux parmesan pour l’infiniment délicat Blanc de Blancs, des paninis mozza-légumes pour le Grand Brut, une salade de tomates et un caviar d’aubergine pour la cuvée Belle Époque, et un bavarois aux fruits rouges ou un dessert lacté aux fraises pour la cuvée rosée Blason rose.
La Boutique Perrier-Jouët
La Boutique Perrier-Jouët, voisine du Cellier Belle Époque, a été ouverte en 2019. Elle rouvre ses portes entièrement rénovée, avec un service de personnalisation à la minute des cuvées Perrier-Jouët (bien pratique pour les cadeaux) et une offre de produits exclusifs, par exemple le miel issu des ruches installées dans les vignobles, une librairie ou des objets de papeterie.
La Maison Belle Époque
Le nom de Perrier-Jouët est associé à l’Art nouveau depuis l’origine de cette tendance artistique. La Maison Belle Époque est une splendide révélation de cette veine esthétique.
En 1850, Eugène Gallice, beau-frère et associé de Charles Perrier, fils des fondateurs, acquiert une vaste maison construite à la fin du XVIIIe siècle. Ce grand collectionneur d’art transmet sa passion à ses fils Henri et Octave. C’est ce dernier, ami des grandes figures de l’art 1900, qui demandera à Eugène Gallé d’émailler d’anémones blanches les flacons de champagne Perrier-Jouët — ceux de la future cuvée Belle Époque. Octave décorera également la maison d’extraordinaires pièces d’art et de mobilier dues aux plus grands artistes de son temps, et c’est pourquoi la demeure, désormais inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco, abrite la plus grande collection privée d’Art nouveau français en Europe.
Minutieusement rénovée et restaurée, elle ouvre cet été ses portes au public. Parmi les pièces les plus remarquables figurent des panneaux muraux en cuir de Cordoue, le salon Majorelle en hêtre sculpté et doré à décor de fougères, une sculpture allégorique de Louis-Ernest Barrias en ivoire et en bronze doré, La Nature se dévoilant à la science, un petit portrait d’Yvette Guilbert par Toulouse-Lautrec et, dans une des chambres, un superbe lit d’Hector Guimard.
C’est dans le bar même de cette maison que se déroule une des plus charmantes étapes du parcours Belle Époque Society. Une magnifique collection de coupes à champagne anciennes a été rassemblée. En préambule du déjeuner gastronomique servi sur la terrasse, chaque invité est prié de choisir une de ces coupes pour déguster le Blanc de Blancs de l’apéritif. Un moment de beauté unique — mais si quelqu’un casse une coupe ? « Nous avons pris le risque », dit Séverine Frerson, chef de caves de Perrier-Jouët.
Nous sommes priés d’emporter à table cette coupe encore pleine. Elle prend place sur une nappe blanche, entre un menu en carton blanc gaufré estampé du relief de la maison et une forêt de verres de cristal émaillés d’anémones.
Le repas gastronomique
D’origine picarde, Sébastien Morellon, chef exécutif de Perrier-Jouët depuis janvier 2021, a travaillé dans les cuisines du Four Seasons George V, du Park Hyatt Vendôme puis de l’hôtel Barrière où, pendant quatre ans, il a côtoyé Pierre Gagnaire avant de le suivre à Bordeaux en tant que sous-chef de La Grande Maison de Bernard Magrez. C’est ensemble que Pierre, chef ambassadeur de Perrier-Jouët, et Sébastien, chef exécutif, ont conçu le menu du déjeuner gastronomique servi sur la terrasse de la Maison Belle Époque, autour de cuvées sélectionnées par Séverine Frerson : pour ce dîner d’inauguration, une horizontale du joli millésime 2004 (voir les infos pratiques pour les cuvées servies au public).
L’impression globale que donne ce repas est que les mets ont été mis au service du champagne et non l’inverse. De là une sensation d’harmonie, de symbiose naturelle avec le vin, à travers la finesse extrême de ce menu reposant sur deux piliers : la nature et la gastronomie française classique, disons carrément Belle Époque, les références à la glorieuse cuisine d’entre 1880 et 1914 y étant nombreuses. Aucune pesanteur, aucune redite, aucune facilité : des amuse-bouche au dessert, cette cuisine haute en goût possède la matière et la densité juste, et le champagne offre une réponse étonnamment mimétique.
Rarement l’harmonie mets-champagne a été si bien réalisée.
Mise en scène par la designer culinaire Laila Gohar, l’assiette d’amuse-bouche langoustines en gelée, sablé au parmesan, gougère et brioche et foie gras de canard poché se laisse picorer dans un décor de sarments, de feuilles de vigne, de romarin frais et de lentillons de Champagne, clin d’œil subtil à ce produit local traditionnel. Exécutées avec une remarquable légèreté, ces quatre bouchées accompagnent la cuvée Belle Époque Blanc de Blancs 2004. « Après la chaude année 2003, dit Séverine Frerson, la vigne, en 2004, a tout donné d’elle-même. Ce champagne en a sous la pédale ; il peut tenir encore vingt ans. » De fait, en dehors d’une fraîcheur revigorante, ce socle aromatique de cire d’abeille, d’encaustique, de vanille et de gingembre confit forme une charpente solide qui nous assure que le breuvage sera parfaitement adapté à ce qui va suivre. Les légumes et le vin, c’est rarement une histoire d’amour, mais le bouquet de légumes et fleurs du moment, burrata, bouillon Zézette fait mentir ce principe.
Le plat est un tour de passe-passe directement adressé au Blanc de Blancs : légumes vapeur (radis roses, navets blancs, céleri, carottes), fleurs de bourrache, pensées et pétales de souci entourent un cube de burrata. La magie, c’est ce qui est versé ensuite : un bouillon vert d’une sapidité intense, un concentré d’umami qui établit sans effort la jonction avec le champagne. Comment le chef a-t-il réussi son coup ? Solution des jeux : ce bouillon contient des champignons. « Normalement, précise Séverine Frerson, les champignons sont à proscrire avec le vin. » Cependant, au lieu d’appuyer sur la touche « champignon », le chef en a extrait les acides aminés, l’arôme, et le tour est joué. Lumineuse démonstration d’alchimie culinaire qu’Escoffier, grand chef de la Belle Époque, n’aurait pas reniée.
À peine remis de ce morceau de bravoure, nous voyons arriver un biscuit de dorade royale, coques couteaux, moules de bouchot, poireaux (il s’agit d’une royale, mais peut-être le chef a-t-il voulu éviter la répétition du mot). Un plat classique, totalement français par sa profondeur de goût, dans la veine des soles normandes et des timbales marines de la Belle Époque. La chair de couteaux et de moules garnit cette pièce moelleuse et douillette. Le Blanc de Blancs, très satisfait de l’accord, ronronne de plaisir.
Avec la cuvée Belle Époque 2004, le quasi de veau fermier au parfum d’estragon, oignons doux caramélisés, courgettes, pommes Cracotte fait sensation.
Le veau rôti, d’une tendreté parfaite, se drape dans des tagliatelle de courgettes et une intense sauce d’oignon réduit. Là encore, le classicisme, la longueur en bouche, le léger côté fumé de la préparation sont en harmonie parfaite avec ce 50 % chardonnay, 45 % pinot noir et 5 % pinot meunier, tout en écorces d’agrumes et en poire confite avec des notes surprenantes d’encens naturel. On ne sait pas exactement pourquoi ça marche, mais ça marche. Les pommes Cracotte, mini-chips de pomme de terre carrées, apportent une touche régressive en forme de clin d’œil.
Cet enchantement se termine sur des fromages de saison adroitement sélectionnés (une spécialité de Pierre Gagnaire) — on ne mentionne même pas leur affinité avec le champagne tant elle paraît évidente — et sur un granité de Perrier-Jouët Grand Brut délicatement posé sur une cuillerée de gelée de groseille. Avec un verre de la cuvée Belle Époque rosé 2004, la note 1900 se prolonge sur un entremets à l’ancienne au goût de bonbon d’antan — moscovite, coulis de fruits rouges, chantilly coquelicot et tuile muscovado — qui clôt cet exercice culinaire Art nouveau magistralement réussi.