DOMAINE JONC BLANC
à Montravel
Franck Pascal et Isabelle Carles
La petite histoire : Après une prise de contact par téléphone et demande d’itw, Franck accepte aussitôt et nous fixons un rendez-vous au domaine le 27 mai. Nous y arrivons vers 9 heures par une splendide matinée, quelques semaines, à peine, après le gel qui a emporté 80 % de la récolte du domaine. En dépit de cet épisode difficile et économiquement lourd de conséquences, Pascal et sa compagne Isabelle nous accueillent avec autant de disponibilité que de gentillesse. Le rédacteur précise qu’il connait, suit et aime les cuvées du domaine depuis de longues années.
De l’agro vers l’agri
Franck, Ingénieur Enita Nantes dominante Agro-Industrie, et Isabelle, cadre de direction trilingue, décident ensemble de reprendre le vignoble (12 ha de rouge puis, un peu plus tard 7 ha en blanc) en 2000, après plusieurs années d’expatriation pendant lesquelles le futur vigneron conçoit et installe des usines de transformation primaire. Loin, bien loin de cet univers, la parcelle qu’ils choisissent est fascinante et vous parle dès qu’on l’embrasse : une étendue où affleurent deux époques géologiques, avec un léger dévers provoquant des ensoleillements différenciés et, ainsi, une palette d’expressions possibles très variée. La conversion en bio est engagée aussitôt et la certification en biodynamie arrive en 2009. « Quand j’ai pris le bouquin de Steiner la première fois, je n’ai pas compris grand-chose, mais c’est bien après que les concepts sont devenus plus clairs et ont fait sens. Tout tourne autour des influences de la lune et du soleil, des phases inspire ou expire du végétal… Je laisse mes vignes aller haut, car je ne veux pas couper les connexions entre apex et énergies… »
Engagements…
L’engagement biodynamique de ce vigneron pointu et poétique est d’autant plus intéressant que sa formation (études d’ingénieur agro) le préserve de toutes approximations… Entre projet biodynamique et implication dans la vie du syndicat, Pascal regrette peut-être que l’appellation « Montravel » demeure largement méconnue ou, en tous cas, qu’elle ne signifie pas plus, pour le grand public. « Nous avons initié quelque chose et d’autres vignerons, jeunes et pleins d’idées, arrivent : Grégoire Rousseau, Aurélien Prouillac, Mathias Marquet, Sylvain Ohayon. Reste, pour ceux qui passe vers Bergerac le plaisir de découvrir ce couple courageux, leur beau domaine et, bien sûr leurs vins magnifiques.
La dégustation
Rosé 2015 Vin de France
Ce superbe rosé de soutirage a été ajourné en dégustation et se voit donc commercialisé en Vin de France. « Nous avons eu 5 défauts, pas moins, pas longtemps après que nous ayons eu des échanges un peu verts avec l’AOC Bergerac et son avenir…Ou le sovkhoze Bergerac plutôt, navire sans boussole filant belle allure vers son mur… » Superbe vin bien tramé, à peine frais, plein d’enthousiasme. Attention : buvabilité extrême.
100 % Gros Manseng 2015
Sol argilo-calcaire profonds. Superbe blanc complexe avec cette légère fraicheur qui vous pousse au second verre et, bien entendu, à la plus complète des modérations.
Classik AOC Bergerac
La cuvée la plus consensuelle du domaine….Si gourmande… Consensuelle et élégante et très précise dans ses expressions, avec un passage en barrique, mais sans ellagitanins envahissants, ni prise de bois intempestive. La finesse, la précision et rien d’autre, on se croirait d’ailleurs presque plus en Bourgogne qu’à quelques encablures du bordelais ! A découvrir.
Nous avons les moyens de vous faire parler…
Le jour où vous avez décidé de faire ce métier ?
– C’est après avoir rencontré des vignerons néoruraux grâce à Pierre Guerrin…
Votre premier souvenir professionnel ?
– Au début, quand nous faisions tout, absolument tout nous-même, nous quittions la vigne tard le soir pour aller à Bergerac où nous habitions à l’époque. 30 km de route après lesquels nous ne pouvions même plus nous extraire de nos sièges, fourbus, ankylosés !
Votre première joie professionnelle ?
– La médaille d’or du CGA en 2001 sur notre millésime 2001, peu de temps après notre installation, notre cuvée parcellaire nommée autrefois « Blanche pierre » et rebaptisée depuis « Sens du fruit ».
Votre première déception ?
– Mon départ de la Fédération des Vins de Bergerac, après avoir fait le constat que rien ou si peu ne pourrait être changé…
Qu’est-ce que c’est votre métier ?
– Être un paysan, prendre soin du vivant comme de la terre, laisser une empreinte écologique positive…
Qui vous a le plus appris ?
– Jacques de la Bordommie, Paul Barre, les échanges avec nos confrères.
Votre plus belle réussite ?
– Nos cuvées de la gamme « Pur », lancés en 2012, des vins précis, minéraux, dans un esprit bourguignon.
Votre plus belle foirade ?
– Quelques cuvées sans souffre emmenées en distillerie… Mais cela fait partie du parcours presque obligé, de la philosophie. Une perte d’argent nette mais un gain d’expérience…
Ce qui vous plait le plus ?
– Isabelle : Être et travailler dehors.
– Franck : Tout.
Ce qui vous sort par les yeux ?
– La paperasse, l’administratif… Certaines fins de salon pendant lesquelles il faut écouter des « connaisseurs » qui ne connaissent pas grand chose !
Les vraies difficultés du métier ?
L’argent.
Et si c’était à refaire ?
– La même chose, tout de suite… Ou, peut-être en Rhône septentrional.