Z’étaient chouettes
les animaux du bord de mer

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Écrit par mon ami Patrick Cadour, dont je lis depuis longtemps la prose foisonnante sur le blog cuisinedelamer.com, Récits et recettes du ressac (Les éditions de l’Épure) vient de sortir et c’est déjà un classique.

Le guide ultime de la pêche à pied
Patrick Cadour s’adonne à la pêche à pied, dans sa Bretagne originelle et ailleurs, depuis plusieurs décennies. Sa connaissance des produits fut empirique avant d’être académique, et chaque chapitre, consacré à un animal comestible du littoral, fourmille d’informations (comportement, lieux et techniques de pêche, réglementations…) dispensées avec une bonne dose d’humour. Le résultat : un bestiaire composite et mystérieux fait de crépidules transgenres, de crabes au caractère de cochon, de poulpes s’enroulant autour des pieds des baigneurs, de coques pacifiques, de couilles de cheval ou de lançons smashés à coups de raquette de ping-pong. Inutile d’espérer garder ce bel objet (coup de cœur pour les illustrations et la maquette de Séréna Obligato) propre comme un livre neuf : sa place est dans la gibecière le jour, sur le plan de travail le soir, avec comme acolytes les embruns, la récolte du moment et les gouttelettes d’huile jaillissant de la friture des anémones en beignets (un délice).

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Des saveurs, des savoirs et des savoir-faire
Car si le livre est passionnant de bout en bout, c’est parce que Patrick Cadour connaît aussi bien les bestioles du ressac que les innombrables façons de les accommoder. Bernique, palourde, praire ou huître peuvent être gobées crues, tandis qu’ormeau, bigorneau, homard, pousse-pied ou sole gagnent à être cuisinés le plus simplement du monde. D’autres encore (poulpe, coque, palourde, plie, congre, tourteau, moule…) autorisent les recettes de caractère, voire les exigent dans le cas du bulot, « loin d’avoir la finesse et la saveur iodées de ses cousins qui consomment des algues (bigorneau, bernique, ormeau) ». Les inspirations sont tantôt locales (ragoût de berniques des îles bretonnes, tartine de bigorneaux à l’andouille de campagne, pétoncles noirs marinés au lait ribot…), tantôt cosmopolites, avec un penchant pour les saveurs asiatiques que l’auteur connaît si bien (bulots à la coréenne, coques au tamarin, ormeaux mijotés au bouillon dashi, congre grillé façon kabayaki, omelette vietnamienne au porc et au crabe, nems d’araignée au pomelo…).

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Pêcher n’est pas pécher
Patrick Cadour défend enfin une pêche à pied respectueuse des ressources avec simplicité, sans jamais se transformer en prédicateur juché au sommet de sa vertu. Il explique par exemple sans emphase que le râteau, « aussi destructeur que la pêche à la dynamite dans une mare », détruit les innombrables œufs et larves de toutes espèces peuplant le sable. Bonne nouvelle pour ceux que la tempérance ennuie : le crabe vert, « espèce invasive » et « redoutable prédateur », n’est pas assez mangé. Ayant pour ces friandises de la mer une affection sincère, l’auteur propose également, en guise d’incipit, une réflexion sur le lien entre l’homme mangeant et l’animal mangé : « On peut penser que découper ou cuire un crabe vivant est plus horrible que d’écrabouiller un moustique (…). Au moins le crabe, je vais le manger, et ainsi perpétuer le lien charnel qui s’est établi entre l’homme et la nature depuis les origines. » Et parce que l’homme est un animal comme les autres, Récits et recettes du ressac délivre des astuces fort utiles pour éviter la noyade, ce qui permettra aux lecteurs de profiter de ces nourritures terrestres (si j’ose dire) le plus longtemps possible.

Z'étaient chouettes<br>les animaux du bord de merPatrick Cadour, Récits et recettes du ressac
 Les éditions de l’Épure
19 €.

 

 


Moules au romarin et au citron


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© Photographie Mayalen Zubillaga

Pour 1 kg de moules pêchées à pied ou achetées chez le poissonnier (quelqu’un les aura bien pêchées à pied de toute façon) :

❶ hacher finement 1 cuillère à café rase d’aiguilles de romarin frais, pas plus. Presser la moitié d’1 citron jaune.

❷ Faire chauffer de l’huile d’olive dans une cocotte. Quand elle est très chaude, verser les moules et le romarin. Couvrir et laisser cuire à feu vif en remuant de temps en temps. Quand les premières moules commencent à s’ouvrir (ça va vite), ajouter le jus de citron et du poivre blanc de Muntok moulu, brasser pour bien les répartir. C’est prêt quand la plupart des moules sont ouvertes. Déguster bien chaud et ne pas oublier de saucer le jus parfumé.

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