Comme d’autres secteurs de bouche, celui du pain est traversé par un mouvement artisanal qui fait battre le cœur des consommateurs attentifs. Son pivot : le levain naturel. Avec son « Carreau de blé », Bernard Pasqualini donne aux alentours du pays d’Aix-en-Provence le goût du pain exécuté dans les règles de l’art boulanger.
Le pain est mort, vive le pain… vivant
Alors que le pain industriel sent au pire le chlore, au mieux rien du tout, le levain naturel donne aux miches artisanales des parfums torréfiés et acidulés, très nets quand on fourre son nez dans la mie (pas devant les invités). Ça tombe bien : les vocations autour du levain se multiplient et l’on se pâme devant les multiples vertus – gustatives, nutritionnelles et de conservation – de cette fermentation de farine et d’eau.
Je ne fais qu’un seul pain, mais je le fais bien
De la boulangerie en Amérique
Bernard Pasqualini a plongé dans le levain naturel après plusieurs vies professionnelles – dont un restaurant à Marrakech – et un voyage solitaire de neuf mois, en moto, à travers les Amériques. « J’ai beaucoup réfléchi à ce que je ferai à mon retour et l’idée du pain s’est rapidement imposée. Quand j’étais petit, j’étais fasciné par les odeurs du fournil de mon village corse. J’ai concrétisé mon inscription à l’école internationale de boulangerie de Sisteron alors que j’étais encore au Chili ! » Quelques heures de route, de recherches et de réflexion plus tard, il imaginait déjà son pain idéal : carré (« un format simple et adapté aux tartines »), pas trop haut (« 8 cm d’épaisseur au maximum pour avoir un bon équilibre entre mie et croûte »), unique (« je ne fais qu’un seul pain, mais je le fais bien. »).
on avait le choix entre les baguettes quelconques de la boulangerie conventionnelle et les briques compactes de l’épicerie bio
Bon à manger et bon à saucer
Dans la campagne du pays d’Aix-en-Provence, on dit merci. Aixois et Marseillais urbains ont en effet leurs boulangers militants depuis plusieurs années*, mais jusqu’à récemment, dans la ruralité villageoise de mézigue, on avait le choix entre les baguettes quelconques de la boulangerie conventionnelle et les briques compactes de l’épicerie bio (sans doute pleines de nutriments attrape-Américain, mais bien trop estouffe-belle-mère pour des Méditerranéen amoureux du pain et soucieux de bien saucer). Désormais, le « Carreau de blé » de Bernard Pasqualini est distribué dans de nombreux magasins bio de la région, sur le marché d’Aix et via des circuits courts . La miche carrée est élaborée avec du levain de seigle (sans ajout de levure boulangère), des farines bio issues de blés anciens cultivés et moulus dans les Alpes-de-Haute-Provence (Moulin Pichard), du sel de Guérande, de l’eau purifiée et c’est tout. Après un pétrissage court et une fermentation lente (14 heures), les pains cuisent pendant la nuit. Au petit matin, ils sont livrés dans le réseau de distribution ou vendus directement au fournil.