On a testé Cleo, la table du chef Bruno Aubin au Narcisse Blanc, dans le 7e arrondissement

Bruno Aubin
© 180°C - Photo Emmanuel Laveran

Bruno Aubin, le jeune chef ex-Top Chef
 « Il y a une quinzaine d’années, c’étaient les cancres qui faisaient de la cuisine ! » Ainsi débute, tout en modestie et en sourire, notre conversation avec le jeune chef Bruno Aubin. Originaire des Deux-Sèvres, il s’oriente vers le lycée hôtelier de La Rochelle avant d’effectuer quelques stages, « notamment à Tourrettes, au Faventia (ex Four Seasons, ndlr) » où officiaient le chef Philippe Jourdin. épaulé de Stéphanie Le Quellec. Un autre stage à Saint-Emilion, à l’Hostellerie de Plaisance chez Philippe Etchebest : quelques mois « très marquants » pendant lesquels il apprend, selon ses mots, la gastronomie, la vraie.

Et après ? On le retrouve au restaurant 3 étoiles du Bristol à Paris, auprès du chef Éric Fréchon. « J’ai tout appris là-bas » affirme Bruno Aubin. Il y demeurera presque huit ans, jusqu’en 2017, lorsqu’Éric Fréchon crée la nouvelle carte du Drugstore Publicis des Champs-Élysées, entraînant son jeune poulain dans une expérience « humainement très marquanteOn arrive dans ce cadre immense, où il faut imposer le style du Bristol. On sort 300 couverts le midi, 350 le soir, 7 jours sur 7. Autant vous dire que ça forge ! » Il y reste trois ans, jusqu’en 2019 : c’est ici qu’entre en scène l’hôtel de luxe aux Invalides le Narcisse Blanc. Bruno Aubin y prend sa première place de chef à l’automne. La situation sanitaire, toutefois, force l’hôtel-restaurant du 7e arrondissement à fermer ses portes… Un an et demi. Une situation difficile à supporter pour l’ancien élève de l’école hôtelière turbulent, énergique, avec l’envie de faire toujours mieux, toujours plus.

Mais si sa carrière est mise entre parenthèses forcées, de ses années en cuisine, Bruno Aubin aura aussi, justement, tissé des liens : avec Pierre Chomet au Bristol, qu’il retrouvera dans la saison 12 de Top Chef, ou encore avec Mohamed Cheikh, autre participant de l’émission télévisée, qu’il côtoie au Drugstore Publicis. Car voilà que Top Chef le contacte une première fois en 2019. « J’ai refusé, c’était ma première place de chef, je ne voulais pas tout mélanger » s’explique-t-il. En 2020, la production de l’émission revient à la charge. « J’admets qu’au début, j’étais un peu sceptique. Mais l’inactivité me rendait fou, je m’ennuyais, alors j’ai accepté. Le parcours dure jusqu’en quart de finale. Top Chef, c’était un défi, des rencontres, une visibilité énorme aussi. » Fidèle à son flair, il y met en pratique la philosophie qu’il applique aujourd’hui chez Cleo : s’inspirer de ce qu’il a envie de manger, tout simplement ! Faire du bon, revenir aux essentiels…qui se distinguent toutefois par quelques détails bien choisis.

Dans l’assiette de chez Cleo, the devil is in the detail
Ses référents ? Eric Fréchon, bien sûr “j’adore sa cuisine simple qui va droit au but, pleine de saveurs et sans chichis.” Et Pierre Gagnaire, “pour l’homme. Son aura charismatique. Son naturel sympathique : c’est rare. » A part ça, Bruno Aubin « aime tout manger » et admet en riant que ses inspirations viennent principalement de ses envies, c’est aussi simple que ça. Ses plats-signature, pour l’instant, révèlent une philosophie prometteuse : « la carotte râpée, marinée au mélange de miel-coriandre-mélisse-curcuma, déposée sur un zébrage d’huile d’olive, de jus de carottes réduit et de moutarde à l’ancienne avec pignons de pin, pollen, râpé de citron vert et poivre tschuli » parle de son envie d’en découdre avec le petit détail qui tue et qui fait la différence : les épices.

Bruno Aubin
Les carottes râpées du chef ! – © 180°C – Photo Emmanuel Laveran

« J’utilise d’ailleurs beaucoup de variétés de poivres. Celui-ci a un petit goût citronné, un peu thaï. » Le poulpe (« dès qu’il y a du poulpe à la carte, je prends ! ») est quant à lui mariné à l’ail, au thym et à l’huile de piment d’Espelette, puis cuit sous vide, avec sa marinade, trois heures à 85°, avant d’être snacké avec une huile parfumée au cumin et servi avec un écrasé de patates douces dans nos assiettes. Là encore, un détail (qui n’en est pas un) pour se démarquer : « ma sauce barbecue au vieux bourbon, avec de l’origan. Je voulais une sauce qui tabassait ! Ce plat, c’était vif et brutal comme un saloon, mais avec un poulpe tendre et bien caramélisé… »

Et on peut dire qu’il tabasse, ce jeune chef qui ne peut pas encore pleinement s’exprimer, dans sa cuisine grande comme un mouchoir de poche, avec une brigade réduite et les exigences, tout de même, d’une clientèle d’hôtel 5 étoiles :

il ne faut pas oublier que dans un hôtel, on doit aussi envoyer des steaks frites.

Ne pas oublier non plus de créer des cartes « faciles » à refaire en cuisine : « il faut faire en fonction des capacités et de l’équipement qu’on a avec soi. Épurer, ne conserver que quelques gestes, les essentiels. Et l’essentiel d’un plat aussi : ce qui vaut la peine d’être mangé, ce qui est simple et bon. C’est une vraie gymnastique ! »

Bruno Aubin
À gauche, amuse-bouche chez Cleo, à droite, les poulpe en deux cuissons, ultra tendre et la sauce barbecue au bourbon du Top Chef Bruno Aubin – © 180°C – Photo Emmanuel Laveran

La carte actuelle ? Terre/mer, notamment avec un quasi de veau confit, oignons, coquillages et salicornes, jus de veau et émulsion de coquillages que Bruno Aubin nous raconte en s’animant. Côté entrées, il vient justement d’y penser. « Pour le printemps, des asperges bien sûr, un œuf parfait aux asperges rôties, avec une émulsion de haddock, un fumet de poisson et du basilic… Je vais faire des essais pour le basilic, je veux voir si ça matche. »

Quid des produits ? De saison, toujours ! « Je travaille beaucoup avec Christophe Latour dans le Gers, depuis le Bristol ! Mais aussi Paolo Senatore du Monde de la Truffe, que j’ai aussi connu dans mes années Bristol. » Un mot de la fin ? Bruno Aubin nous souffle que, s’il peut un jour prétendre à ouvrir sa propre adresse, elle sera entièrement dédiée au poisson, ses premières amours. « Et si je fais une viande, ce sera du chevreuil, du pigeon, du cerf, quelque chose de peu consommé. » On se souhaite d’y goûter un jour. Une chose est sûre, on suivra d’un œil ce jeune chef à la philosophie prometteuse, aux grandes ambitions dans la simplicité et aux mélanges ravageurs.

Texte de Elsa Cau

On a testé Cleo, la table du chef Bruno Aubin au Narcisse Blanc, dans le 7e arrondissement

Restaurant Cléo – Le Narcisse Blanc
19 Bd de la Tour-Maubourg, 75007 Paris
75007 PARIS
01.40.64.44.32

 

Menu Cléo Servi du lundi au vendredi (29€)

Mise en bouche – Plat du jour

Le Café Gourmand

 

Menu Narcisse (49€)

Mise en bouche

Le Poireau

Le Saumon ou le Paleron de boeuf

La Barre Chocolatée

 

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