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Glyphosate, encore et toujours.
L'édito de 180°C #16
Glyphosate, encore et toujours.
L'édito de 180°C #16L’envie première de cet édito était de vous sensibiliser à un nouveau problème auquel est confronté notre écosystème, la présence en masse de vers invasifs arrivés sans doute du Brésil par bateau dans des pots de fleurs pour certaines espèces ou de Nouvelle-Guinée pour d’autres. Et que croyez-vous que ces vers, comme l’obama nungara, mangent-t-ils ? Nos lombrics ! Nos chers vers de terre qui permettent la régénération des sols afin qu’ils restent productifs et fertiles. Déjà menacés par les pesticides et les engrais chimiques qui épuisent les sols, les lombrics sont, comme nos abeilles, en grave danger.
Nos vers de terre, dont le nombre ne fait que baisser, auraient pu penser que la promesse d’Emmanuel Macron d’interdire le glyphosate allait leur faire le plus grand bien et leur permettre d’oublier, un temps, la présence des vers invasifs. Grâce à Emmanuel Macron, ils allaient enfin retrouver, à terme, des sols riches en matière organique et en végétaux. Peine perdue, ils ont appris en janvier 2019, au cours d’un débat citoyen à Bourg-de-Péage, dans la Drôme, que le président de la République pensait que la France ne parviendrait pas à se passer à 100 % du glyphosate dans trois ans. Et la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), quelques semaines plus tard, par la voix de sa présidente, Christiane Lambert, de saluer le pragmatisme d’Emmanuel Macron.
Il est consternant de constater que pour certains la loi s’applique sans problèmes et que, pour d’autres, elle ne doit surtout pas être pensée, votée, mise en place. Vous, par exemple, lecteurs de 180°C ou de 12°5, vous n’avez plus le droit d’utiliser des pesticides dans vos jardins, sur vos balcons ou sur vos terrasses depuis le 1er janvier 2019. Pourquoi ? Parce que c’est la loi du 22 juillet 2015. Vous, par exemple, jardiniers de collectivités locales ou d’établissements publics, vous ne pouvez plus employer de produits phytosanitaires sur les voiries, dans les espaces verts, dans les forêts et dans les promenades ouvertes au public depuis le 1er janvier 2017. Pourquoi ? Parce que c’est la loi. En revanche, les céréaliers, les vignerons, les agrumiculteurs, les arboriculteurs peuvent continuer à bombarder leurs pommes, leur maïs, leur blé, leurs abricots, leurs vignes… de fongicides, d’insecticides, d’herbicides. Pourquoi ? Parce que l’Assemblée nationale a refusé d’inscrire dans la loi l’interdiction du glyphosate d’ici trois ans.
Les vers de terre, sauf ceux du Salvador et du Sri Lanka, deux pays qui ont banni le glyphosate en 2013 et 2015, n’ont donc que leurs yeux pour pleurer sauf… qu’ils n’ont pas d’yeux. Ils peuvent alors mourir tranquillement, dévorés par l’obama mungara ou intoxiqués au glyphosate. Leur sort n’intéresse pas grand monde dans les cabinets feutrés de la République où les lobbyistes creusent leur sillon.
Philippe Toinard, rédacteur chef de 180°C.